Emile Decamps dit » Kète sans d’jambes »
Emile Decamps naquit à Courcelles le 28 mai 1878.
En 1890 à l’âge de 12 ans travaillant aux usines de Seneffe, il fut happé par une poulie aveugle lancée à 300 tours/minute, son corps fut disloqué, ses os broyés, ses espoirs irrémédiablement ruinés.
Mais son âme d’adolescent voulut survivre et donner à ses amis et compagnons un magnifique exemple de courage et de ténacité.
Deux jambes et un bras sectionnés, triste bilan à une époque où l’assurance sociale ou mieux , l’assurance tout court, était inexistante.
Par pitié, une âme charitablement lui offre une charrette et deux chiens.
Au hasard des routes, durant six longues années, il se traîne de porte à porte, mendie son pain en vendant du tabac, se heurte à l’incommensurable bêtise légale et policière ;il est arrêté presque chaque jour, gîte à l’ « amigo » est relaxé le lendemain et recommence….
Destinée terrible pour un cœur vibrant sur deux pauvres moignons persécuté sans cesse.
Mais Emile survit !
Harassés, vieillis, ses deux chiens, fidèles compagnons d’une existante perpétuellement errante, s’éteignent.
Emile se traine sur les genoux. Il veut et il faut vivre, grappiller sa maigre part du bonheur terrestre.
1907, année bénéfique, Decamps, économe et parcimonieux, achète un âne, ouvre un tout petit commerce de vins et liqueurs.
A cette époque, les cafés pullulaient, le mobilier était quasi inexistant. Deux tréteaux ou tonneaux et une planche suffisaient comme comptoir. Pour ouvrir ce commerce il fallait également payer les patentes (taxe sur débit d’alcool), le premier client pouvait venir boire son « péket ». .
A Familleureux en 1912, on comptait 15 débits de boissons. Une chope de bière coûtait 5 centimes et un verre d’alcool un gros sous (Gros sous = 10 centimes, une cense = 2 centimes, un gigot = un centime).
Emile pérégrine de village en village, de hameaux en lieux-dits, présentant fièrement sa pacotille.
En 1908, l’âne est mué en cheval, le misérable fonds de commerce devint fructueux.
Comment Emile chargeait sa marchandise dans la charrette ?
Il attelait en premier son cheval, jusque-là aucun danger mais quel courage avec un seul bras « charger ses bacs de liqueurs ».
Ensuite, il fallait monter sur la charrette par les rayons en bois de la roue, si le cheval avait bougé, Emile aurait été écrasé.
Au contraire, celui-ci se retournant regardait monter son maître quand il était bien installé, il avançait.
Souvent c’est le cheval qui ramenait Emile chez lui. Comme bon commerçant à chaque estaminet il offrait un verre et en consommait également, après avoir fini sa tournée imaginez-vous dans quel état était notre Emile, généralement la dernière « auberge » c’était le cabaretier qui l’aidait à monter dans sa charrette et une petite claque sur la croupe du cheval et c’était parti pour la maison.
Ecoutant au doigt et à l’œil, ce cheval était une « perle »
Emile habitait rue de Marche, 3 à Feluy, il tenait également un débit de boisson.
En 1914, la première guerre éclate, malheur à Emile, son cheval fut réquisitionné par les allemands.
Par la suite, il dut acquérir, pour survivre, un autre cheval qui fut moins docile.
En 1932, Emile se voit enfin obtenir une pension….
Emile s’éteint à Feluy le 8 décembre 1954.
L’homme amoindrit fut un modèle de foi et de volonté de surpassement…..
Une vie exemplaire !!!
Léon Leheut
Voici la maison ou vivait Emile avec son garage pour son cheval et sa charrette. Emile tenait avec son frère un café dans la pièce de devant et les week end parfois même il y avait un accordéoniste pour danser